25.04. Rencontre avec René Dumont.

Le 22 mars 95, au salon du livre, au détour d'une allée, je tombe sur René Dumont qui dédicaçait son dernier livre. C'était pour moi une joie de rencontrer le patriarche de l'écologie française. À la vue de ce personnage qui était pour moi presque un mythe, me revint en mémoire l'affiche de la campagne municipale de mars 1977. Cette affiche montrait par un dessin très coloré un Paris où l'on voyait les gens se baigner dans la Seine ainsi que des immeubles couverts de plantes vertes et d'éoliennes. Sur chaque côté de ce dessin il y avait une colonne de texte, l'une décrivait toutes les absurdités et les horreurs du monde moderne et l'autre donnait les propositions écologistes ; en haut de l'affiche : " Quand vous voudrez... " et en bas : " Dumont, Lalonde, les amis de la Terre, Paris Ecologie ". Entre deux dédicaces, j'engage donc la conversation avec ce Monsieur Dumont qui pour 91 printemps semblait encore relativement alerte. Et, je lui pose la question suivante : " pensez-vous que le capitalisme perdure 10 ans, 20 ans, 50 ans ou plus ? ". La réponse ne s'est pas fait attendre : " si le capitalisme existe encore dans 50 ans, la planète sera dans un tel état de délabrement que je n'ose même pas l'imaginer " me dit-il attristé par cette éventualité...

25.08. Un monde intolérable. Le libéralisme en question.

Dans ce livre de René Dumont et de Charlotte Paquet paru aux éditions du seuil, il est démontré que le capitalisme ne se soucie guère des générations futures, des démunis et des exclus et que si l'on peut comparer une société à un individu on pourrait croire qu'elle se suicide... Extraits :

Après le Club de Rome en 1972, les Nations unies ont publié en 1987 Our common Future qui, tout comme les State of the World du Worldwatch Institute de Washington, nous apportent la conclusion, désormais incontournable, des travaux de la grande majorité de la communauté scientifique mondiale : l'humanité court à sa perte, si elle se montre incapable d'infléchir totalement l'évolution de notre société de consommation ; en somme, si elle continue à se révéler irresponsable... L'échec des communistes n'accrédite pas pour autant un intégrisme libéral incontrôlé. Acceptez l'alternative communisme -- libéralisme serait faire preuve d'un total manque d'imagination : il y a bien d'autres possibilités. Du reste, l'octobre noir de 87 vient de rabattre la superbe des Reaganiens et autres libéraux inconditionnels dont la grille économique continue d'ignorer les problèmes de l'environnement... L'économie se prétend distincte de la morale, se considérant parfois comme une science quasi infaillible. La voici prise en flagrant délit d'échec... Les " progrès " de notre économie sont désormais dépassés par leurs dégâts ; le bilan global, s'il profite toujours aux privilégiés, contribue à ruiner les démunis, et menace l'avenir de l'homme et des autres vies sur la terre. Il nous faut donc remettre en cause l'explosion productiviste des pays riches, tout comme l'explosion démographique des pays pauvres. Ceux qui proclament, sans la prouver, sans réfléchir, la défaite de Malthus, sont de dangereux irresponsables... Le quart monde s'étend dans les pays développés incapables de répartir entre tous les actifs le travail encore socialement nécessaire : ce problème ne paraît insoluble qu'à ceux qui résonnent dans le cadre d'une économie prétendument scientifique et de ce fait refusent de prendre prioritairement en compte des problèmes sociaux -- les problèmes moraux... Aujourd'hui d'établir un monde vivable pour tous ses habitants, demain d'assurer la survie prolongée de l'humanité ; laquelle irait à la mort lente si elle acceptait les injustices et les absurdités qui caractérisent notre époque -- finalement plus injuste et plus " gaspilleuse " que " glorieuse "... Jusqu'au colonialisme, les inégalités sont encore modestes, c'est la révolution industrielle lancée par l'Angleterre en 1780 qui va sans cesse accentuer les inégalités entre pays pauvres et pays riches... Les inégalités sont encore plus flagrante à l'intérieur de ces pays pauvres, surtout en Amérique du Sud. La violence en Colombie, la lutte armée au Pérou, certes condamnables, trouvent une justification dans des écarts de revenus intolérables... Les inégalités entraînent les riches à des gaspillages qui provoquent un rapide épuisement des ressources rares non renouvelables et surtout des niveaux de pollutions qui mènent, à long terme, l'humanité à sa perte... Les libéraux se proposent d'étendre ce modèle discutable de l'économie des riches, celui de notre société de consommation de masse, à l'échelle mondiale. Si l'on y parvenait, on compromettrait, les chances de survie prolongée de l'humanité... Notre société est passée d'une ère de " progrès " à une civilisation de gaspillages invraisemblables.

Pour essayer de conclure : il reste de l'espoir, si... -- de la page 269 à la page 282 --. C'est bien pratique les logiciels de reconnaissance vocale, mais ce n'est pas encore tout à fait au point. Quoi que, la dernière phrase a été dictée n'est (mais) pas retour chez. Retour chez, non retouché.

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