99.22.L'argent, le capital, le billet de banque, l'Euro et les SELs.

La pièce d'or frappé par le souverain local puis le billet à ordre émis par les Templiers puis par les Lombards ont permis l'ouverture des cultures locales, des marchés locaux à la région, à la nation et finalement aux échanges internationaux. La fonction sociale de l'aristocratie était de garantir l'ordre et la sécurité sur un territoire donné. Le garant de la confiance dans l'échange était le monarque (pièce de métaux relativement rares et inoxydables frappés à l'effigie du roi régnant sur un territoire). La montée en puissance à partir du XVIe siècle puis finalement la prise du pouvoir à la fin du XVIIIe par les marchands a permis à ces derniers le contrôle du symbole échange (les banquiers). Le problème de l'instauration d'un intérêt (désintéressé sur la finalité de l'utilisation du capital) est notoire, c'est l'accumulation et la concentration du symbole de confiance. L'argent n'est plus produit pour faciliter les échanges de bien et de services et permettre à la production de satisfaire les besoins de consommation mais pour satisfaire les besoins solvables et mercantiles et être prêté à intérêt.

L'argent fut inventé au départ pour faciliter les échanges commerciaux de biens et de services. Il développe aujourd'hui des effets pervers et les professionnels de l'argent l'ont récupéré pour le faire travailler à leur profit personnel. Il faut donner au travailleur juste assez pour produire et se reproduire. Les professionnels de l'argent vivent comme des parasites au détriment de ceux qui les nourrissent. Nos ancêtres ont créé l'argent afin de faciliter les échanges ce n'est pas pour qu'il soit prêté à intérêt.

Du coquillage à la monnaie électronique en passant par la pièce d'or, le symbole d'échange et la valeur qu'elle représente est fonction uniquement de la confiance que nous voulons bien lui accorder.

Pourquoi pensez-vous que les spéculateurs et les financiers tentent-ils aujourd'hui d'imposer une dictature monétariste ? Parce que c'est la seule manière pour eux de se maintenir au pouvoir.

L'euro à 6,55957 F.F. n'est-il pas symptomatique d'une technocratie qui pour, justifier son salaire -- plus que confortable -- invente une devise avec une parité de 6 chiffres significatifs (ça fait sérieux 6 chiffres ! Personnellement, je trouve ça plutôt ridicule. Mais, vous n'avez pas l'impression qu'ils se payent votre tête ?). On privilégie la valeur symbolique de l'argent au détriment de la valeur réelle qu'il est censé représenter. C'est le plus sûr moyen d'appauvrir les citoyens et la planète entière, mais les "pros" de la finance n'en ont cure. Lorsque l'on détruit des tomates pour garder le prix à un prix surfait, cela ne profite ni aux producteurs ni aux consommateurs mais uniquement aux spéculateurs.

La logique du fonctionnement du système bancaire international pousse les banquiers à prêter pour n'importe quel projet pourvu qu'il soit source de profit. N'oublions pas que le seul souci du banquier c'est de prêter l'argent qu'il crée. On en arrive donc, aux faillites des caisses d'épargne américaines ou au scandale du Crédit Lyonnais. Des projets aussi fous et à l'utilité pour le genre humain tout à fait marginal comme le fait d'envoyer 66 satellites afin de permettre à quelques dizaines de milliers de privilégiés de pouvoir communiquer du milieu du désert de Gobi ou du sommet de l'Everest (projet Iridium, principal actionnaire : Motorola, coût : 5 milliards de $) alors que les deux tiers de l'humanité ont des problèmes de nutrition, de santé et d'éducation sont symptomatiques de l'absurdité, la stupidité et l'hypocrisie des règles de fonctionnement de notre société. Ceci dit, les banquiers ne sont pas plus responsables que les ingénieurs et les techniciens qui réalisent ces projets stupides. Les ingénieurs, les techniciens et les ouvriers brefs les salariés qui n'ont que leurs forces de travail à offrir ne sont que les esclaves modernes des financiers et des technocrates. Les maîtres sont obligés de maintenir ce système pour se maintenir en place et les esclaves sont obligés de travailler pour vivre. Financiers et salariés sont tenus par la peur et l'avidité. Mais qui a le plus peur ?

Nous avons inventé " l'argent -- symbole d'échange et d'énergie humaine " parce qu'il simplifie les échanges et surtout parce que l'homme considère qu'il a besoin d'un symbole qui représente son mérite accumulé. La société "parfaite" pourrait être une société sans argent dans la mesure où chacun travaillerait par plaisir et pour le bienfait de la communauté. Pour qu'une telle société existe, il faudrait évidemment qu'il y ait un très grand climat de confiance parmi les individus. Comme chacun sait, dans le capitalisme, l'argent sert plus celui qui exploite le travail des autres que ceux qui travaillent véritablement. Les enfants des pays du tiers-monde, les petits exploitants agricoles, les ouvriers du bâtiment etc. ne sont pas les plus riches et pourtant ce sont eux qui travaillent le plus. Les technocrates du FMI, de Bruxelles ou d'ailleurs, les banquiers, les fabricants d'armes, les marketing-men et tous les profiteurs de notre société de consommation ne sont pas ceux qui rendent les services les plus utiles à la communauté et pourtant ce ne sont pas les plus pauvres. Donc, l'équation idéale : argent = mérite accumulé est en grande partie faussé par la corruption. L'équation actuelle est plutôt : argent = capacité à être le plus malin à manipuler et à exploiter la nature humaine -- et la nature tout court. La suspicion, qui pourrait naître dans une société sans argent (c'est à dire sur le travail que chacun accompli véritablement pour le bénéfice de la communauté ou autrement dit le travail réellement utile), pourrait difficilement être pire que la corruption actuelle. En effet, si on analyse les différentes fonctions sociales des individus dans notre civilisation, on arrive rapidement à la conclusion que le travail véritablement utile ou bénéfique représente un faible % de toute l'énergie humaine déployée.

Certes, le symbole d'énergie humaine représenté par la pièce d'or ou par le billet de banque simplifie l'échange entre les humains. Mais la capacité à émettre ce symbole ne doit pas être détenu par une caste ou une classe particulière. La capacité d'émettre le symbole d'échange ne peut appartenir qu'au pouvoir politique démocratiquement élu par l'ensemble des citoyens que ça soit au niveau local ou national. Les systèmes d'échanges locaux (SEL) ne sont rien d'autre qu'une réappropriation de la capacité à garantir l'échange sur un territoire par les citoyens.

La monnaie unique européenne est l'appropriation de l'émission du symbole d'échange par une caste de technocrates qui prétend détenir la vérité sur "les lois économiques". Ces lois économiques qui ne sont que la mise en forme de la vision politique des marchands. Je suis donc, définitivement, contre la monnaie unique européenne qui ne va qu'asseoir davantage la dictature marchande des transnationales. Par contre, je crois que l'éclosion des SELs avec émission de papier monnaie est bénéfique pour le développement de l'économie et des liens sociaux locaux. À mon sens, l'économie est enchassé dans le lien social. On en revient aux valeurs humaines qui sont finalement la seule richesse véritable d'une communauté. Certains aiment s'agiter, d'autres rester tranquilles. S'il est évidemment méritoire de contribuer par son activité au bénéfice de la communauté, il n'est pas pour autant répréhensible de mendier. Ce qui est, par contre, contraire à l'éthique ; c'est de profiter et de manipuler autrui -- grâce à sa compréhension des mécanismes psychologiques de l'humain -- à son seul bénéfice.

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